INTERVENTION VÉTÉRINAIRE INÉDITE POUR YALA

YALA, FEMELLE GIBBON CONCOLORE, DIABÉTIQUE

Article mis à jour le 16 nov. 2021

Née au Zoo de Mulhouse en 1981 et présente au Zoo de La Flèche depuis septembre 1991, Yala est une femelle gibbon concolore, doyenne du parc, qui évolue quotidiennement aux côtés de Jawi avec qui elle forme un couple inséparable. Les gibbons vivent en couple monogame et élaborent en duo leur cri afin de marquer leur territoire commun.

« Yala est une femelle gibbon douce, gentille et très tolérante avec tout de même un caractère bien marqué afin de définir sa place »
confient les soigneurs qui l’accompagne en quotidien et qui ont créé un réel lien de confiance. Âgée de 40 anstrès bel âge pour un gibbon dont la longévité moyenne en milieu naturel est de 30 ans, Yala s’est révélée être diabétique il y a quelques semaines.


YALA, FEMELLE GIBBON DIABETIQUE ?

En avril dernier, suite à une modification de son comportement notamment une surconsommation d’eau, une intervention vétérinaire a été effectuée. Au cours de l’examen, les vétérinaires accompagnés des soigneurs ont pu constater une perte de poids très significative chez notre femelle gibbon. Divers examens (échographie, radiographie, prise de sang et examen d’urine) ont alors été réalisés afin de déterminer les causes. Les analyses de sang et urinaire ont révélé une quantité anormale de glucose permettant de diagnostiquer un diabète chez Yala.

Dans un premier temps, un régime alimentaire plus pauvre en sucres a été mis en place par les équipes vétérinaires et soigneurs animaliers du parc afin de stabiliser sa glycémie. Malgré ce régime et après analyses, la glycémie de Yala (aussi appelé « taux de glucose » ou « taux de sucre » sanguin) restait encore trop élevée. Face à son grand âge et aux résultats médicaux peu encourageants, il s’est avéré primordial d’ajouter au régime de Yala un traitement médical spécifique.


INTERVENTION VÉTÉRINAIRE INÉDITE ?

Lors de la mise en place de ce traitement contre le diabète, l’analyse de la glycémie quotidienne est indispensable afin d’adapter le dosage du médicament et surtout ne pas entraîner d’effets indésirables pouvant affaiblir sévèrement l’animal. Un traitement non approprié pourrait entraîner, par exemple, une chute radicale de la glycémie, pouvant engendrer une hypoglycémie sévère . La glycémie devient alors l’indicateur permettant de contrôler l’efficacité du traitement.

 

« Le glucose est l’énergie de notre organisme ; à trop forte dose il devient néfaste et à trop faible dose nos cellules ne fonctionnent plus. Dans le cas de Yala, le traitement mis en place vise à faire diminuer le taux de glucose sanguin pour qu’il revienne à des valeurs normales. Avant le traitement, la glycémie de Yala était beaucoup trop élevée, puisqu’elle était environ 5 fois supérieure à la moyenne chez les gibbons ! »

Margaux – Vétérinaire du Zoo de La Flèche

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IMPLANTATION D’UN CAPTEUR DE GLYCÉMIE

Ainsi, pour faciliter ce contrôle, les équipes du Zoo de La Flèche (vétérinaires & soigneurs animaliers) ont procédé à une intervention inédite : l’implantation d’un capteur de glycémie sur l’arrière du bras de Yala. Ce capteur est le même que celui utilisé pour l’humain !

À l’aide d’un lecteur numérique, ce capteur, viable pendant 14 jours, permet aux équipes de suivre quotidiennement, de manière très régulière et précise, l’évolution du glucose sanguin de Yala et ses réactions face au traitement médical.

 

 


IMPACT DE L’ALIMENTATION ?

Les équipes du parc ont pu constater dès les premières heures, une fluctuation du taux de glycémie chez Yala au fil de la journée. Selon les premières observations (résultats ci-dessous), l’alimentation a en effet un impact considérable sur la glycémie de Yala ; montrant notamment un taux de glucose sanguin diminuant en seconde partie de nuit, s’expliquant par l’absence de nourriture dans le corps de notre femelle gibbon et remontant très fortement après le nourrissage du matin.

Photo 1 : mesure de la glycémie – Photo 2 : Résultat de la glycémie de Yala – Photos 3 & 4 : Suivi du taux de glycémie sur une matinée et sur une journée


SUIVI DU TRAITEMENT ?

Après 2 semaines de lecture de glycémie grâce au capteur et aux prélèvement sanguins, les analyses n’ont pas permis d’identifier un effet de ce premier traitement sur la glycémie de Yala. Après de nombreuses recherches scientifiques et consultations avec des homologues, les vétérinaires du parc ont fait le choix de tester un second traitement en espérant qu’il soit plus efficace chez notre primate. Contrairement au premier traitement qui demandait une prise de médicament quotidienne par voie orale de la part de notre femelle gibbon, ce nouveau processus nécessite une unique injection toutes les 4 à 6 semaines.

A l’issus de ces 15 premiers jours, une nouvelle intervention vétérinaire a donc été réalisée afin de retirer le premier capteur, dont la durée d’utilisation est de 2 semaines, et procéder à de nouveaux prélèvements pour refaire un bilan complet de la santé de Yala. Cette anesthésie a également permis de faire la première injection du nouveau médicament. Suite à cette seconde intervention, la glycémie de Yala est suivie de manière hebdomadaire grâce à un glucomètre, lecteur de glycémie permettant de mesurer le taux de glucose dans le sang après avoir effectué une petite piqûre sur un des doigts de Yala pour voir une goutte de sang.

DES RÉSULTATS ENCOURAGEANTS ?

UNE SEMAINE APRÈS L’INJECTION DU NOUVEAU TRAITEMENT, LA GLYCÉMIE DE YALA S’AMÉLIORE,
AFFICHANT 401MG/DL LE MATIN AU NOURRISSAGE ET 447MG/DL EN MILIEU DE JOURNÉE.

Pour rappel, avant tout traitement, la glycémie de Yala était d’environ 450 mg/dL en fin de nuit puis dépassait les 500 mg/dL après les nourrissages et tout au long de la journée (sachant que le capteur ne peut identifier une glycémie supérieure à 500mg/dL). Pour mieux comprendre ces chiffres, voici ci-dessus un comparatif des taux de glucose moyen chez les bovins, les chats, les gibbons et les humains.


MEDICAL TRAINING EN COURS : DÉFI DE 4 SEMAINES ?

Afin de pérenniser ce traitement nécessitant une injection toutes les 4 à 6 semaines, les soigneurs mettent en place un nouvel entraînement médical avec Yala. L’idéal serait ainsi que notre femelle gibbon accepte, de manière volontaire et grâce à un lien de confiance avec ses soigneurs, l’injection de son traitement, sans être contraint de procéder à une sédation.

 

« Aujourd’hui, cette intervention vétérinaire est inédite sur un gibbon. De plus, on s’adapte à une maladie compliquée sur un animal vieillissant. Ces 2 facteurs font de cela un cas complexe. Mais Yala est pour le moment très tolérante et accepte bien les soins prodigués. L’objectif est ainsi de ralentir le diabète de Yala qui a une glycémie vraiment très élevée. »
Margaux – Vétérinaire du Zoo de La Flèche

 

Ces divers éléments ont ainsi pour but de stabiliser l’état de santé de notre doyenne du parc dont nous venons de célébrer les 40 ans !


GIBBON CONCOLORE : ESPÈCE EN DANGER CRITIQUE D’EXTINCTION ?

Les gibbons sont globalement menacés de disparition à cause du trafic comme animal de compagnie, de la déforestation, de la destruction et fragmentation de leur habitat.

L’UICN a classé l’espèce en “Danger critique d’extinction”. Des programmes de conservation in-situ (sur le terrain) permettent la protection des gibbons dans leur milieu naturel.

Acteur engagé de la conservation de la biodiversité, le Zoo de La Flèche soutient depuis plusieurs années l’association Anoulak qui oeuvre à la connaissance et à la protection de cette espèce du Laos.

Les zoos membres de l’EAZA, dont le Zoo de La Flèche, complètent le travail des organisations de terrain via des programmes européens pour les espèces menacées (EEP).